Le tribunal administratif de Montpellier a ordonné la suspension des travaux d’aménagement d’une ancienne carrière, invoquant une menace « grave et irréversible » sur un écosystème fragile.
Dans une décision qui relance le débat sur l’équilibre entre développement économique et protection de l’environnement, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a ordonné, le 7 mars 2024, l’arrêt immédiat des travaux sur une ancienne carrière à Villelongue-dels-Monts, dans les Pyrénées-Orientales. Ce projet, initié par le Syndicat mixte de gestion et d’aménagement Tech-Albères (Smigata), avait pour but de créer un bassin de rétention d’eau brute destiné à l’irrigation agricole.
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Une Décision Controversée
Le projet s’appuyait sur un arrêté préfectoral du 28 février 2024, qui autorisait le lancement des travaux sur la base d’une simple déclaration préalable. Cependant, l’association France Nature Environnement Occitanie Méditerranée (FNE Ocmed) a vivement contesté cette autorisation, estimant que le projet, situé en bordure du fleuve Tech et au cœur d’une zone classée Natura 2000 et ZNIEFF, aurait dû être soumis à une procédure plus rigoureuse en vertu de la loi sur l’eau.
Arguant d’une violation manifeste du droit de l’environnement, FNE Ocmed a déposé un « référé-liberté » devant le tribunal administratif. Cette procédure exceptionnelle, introduite en droit français en 2022, permet d’interrompre rapidement toute atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, y compris le droit à un environnement sain.
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Un Écosystème Fragile en Péril
L’association a exprimé ses préoccupations quant à la présence d’espèces protégées et d’habitats naturels sensibles dans la zone visée par les travaux. FNE Ocmed a particulièrement souligné l’impact potentiel du débroussaillage, du terrassement et de la mise en eau sur une surface de 3,5 hectares, qui pourraient menacer la biodiversité locale.
Parmi les espèces les plus vulnérables figure la tortue émyde lépreuse, un reptile rare et protégé, qui trouve refuge dans cette zone humide. L’absence d’un inventaire naturaliste complet avant le début des travaux, pourtant requis dans un tel contexte, a également été critiquée par le juge des référés.
Une Victoire pour la Protection Environnementale
En suspendant les travaux, le tribunal administratif a donné raison à FNE Ocmed, rappelant l’importance du principe de précaution en matière d’environnement. Le juge a souligné que « l’urgence est caractérisée » et que l’accord préfectoral risquait de causer « une atteinte grave et manifestement illégale aux espèces protégées présentes sur le site ».
Pour Olivier Gourbinot, coordinateur fédéral à FNE Ocmed, cette décision représente une avancée significative dans la reconnaissance du « droit constitutionnellement garanti à un environnement sain et équilibré ». Il s’agit du deuxième référé-liberté environnemental couronné de succès depuis son introduction en France.
Simon Popy, président de FNE Ocmed, a averti contre la tentation de sacrifier la protection de l’environnement au nom de l’urgence climatique. Bien que la lutte contre la sécheresse soit une priorité, elle ne doit pas se faire au détriment du cadre légal et de la préservation des écosystèmes fragiles. « Détruire une zone humide sans une évaluation environnementale sérieuse est non seulement illégal, mais aussi contre-productif », a-t-il affirmé.
Un Débat Qui Dépasse le Contexte Local
L’affaire du bassin du Tech illustre les tensions croissantes autour de la gestion de l’eau et des ressources naturelles dans un contexte de changement climatique. Elle souligne la nécessité de concilier les besoins économiques et agricoles avec la préservation de la biodiversité et des écosystèmes.
Le recours de plus en plus fréquent au référé-liberté environnemental témoigne d’une conscience citoyenne en pleine expansion et d’une volonté accrue d’impliquer la justice dans la protection de l’environnement. Reste à voir si cette décision fera jurisprudence et encouragera des initiatives similaires à travers la France.